2ème DIMANCHE DE PÂQUES 2020

19 avril 2020.

 2ème DIMANCHE DE PÂQUES.

Chers frères et sœurs dans le Christ,

Le deuxième dimanche de Pâques appelé aussi dimanche de la Divine Miséricorde nous rappelle la miséricorde infinie de Dieu pour l’humanité. C’est lors de la canonisation de sainte Faustine qui eut lieu le 30 avril 2000 que le saint Pape Jean-Paul II institua ce deuxième dimanche de Pâques comme dédié à la Divine Miséricorde. Au cours des révélations privées dont jouissait Faustine, le Christ lui aurait demandé  de faire en sorte que sa miséricorde soit particulièrement honorée par toute l’Église le 2^ème dimanche de Pâques.

Comment comprendre qu’on puisse parler de la Divine Miséricorde en ce 2^ème dimanche de Pâques ? La mission confiée aux apôtres dans la page d’évangile de ce jour me semble éclairante de ce point de vue : « Recevez l’Esprit Saint. A qui vous remettrez ses péchés, ils lui seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés ils lui seront maintenus. » Visiblement, la mission principale reçue du Christ ressuscité par les apôtres consiste à révéler à l’humanité l’amour miséricordieux de Dieu à travers la rémission des péchés. C’est cet amour que le Christ a révélé au monde jusqu’à mourir sur la croix en donnant sa vie en rançon pour la multitude.

La question est comment témoigner, annoncer le Christ ressuscité dans notre monde aujourd’hui de façon à être convaincant et pertinent ? Annoncer que le Christ (rejeté, humilié, crucifié et mis à mort) est ressuscité n’est pas une mission facile. Il y a lieu de fournir aux auditeurs toutes les preuves tangibles voire irréfutables qui attestent effectivement sa résurrection. Dans ce sens, on comprend la réaction de Thomas dans la page d’évangile que nous venons d’entendre : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas ma main dans son côté, non, je ne croirai pas ! »

Au fait, ce que vise Thomas dans son affirmation est une vérification scientifique du fait de la résurrection. Ce fait doit être soumis à une objectivisation scientifique : la résurrection du Christ doit être quelque chose de vérifiable et d’objectivable par les sens. Or, toute la dynamique du récit tend plutôt à montrer que la résurrection du Christ n’est pas un fait vérifiable scientifiquement (ni par les sens ni par la raison humaine) mais il s’agit d’une réalité à expérimenter, à vivre du point de vue de la foi. C’est une expérience personnelle à faire du ressuscité qui pour nous devient un lieu de conviction et d’attestation de sa présence, comme le montre bien l’attitude de Thomas dans la page d’évangile. La confession de Thomas (« Mon Seigneur et mon Dieu !») apparaît ici en effet comme l’expression de la conviction forte qui anima l’apôtre après sa rencontre personnelle avec le ressuscité. Suite à cette rencontre avec le Ressuscité, il ne pouvait pas ne pas l’exprimer dans une confession de foi. Cette expression est ce qui lui permet de rendre visible la présence du ressuscité dans le monde. Je voudrais à la lumière des textes d’aujourd’hui attirer l’attention sur deux lieux précis où s’exprime la présence du ressuscité.

Le premier lieu est la vie de communion fraternelle dans les premières communautés chrétiennes. Les premiers chrétiens, du fait de se réunir en communauté, attestent par leur style de vie particulier la résurrection du Christ. C’est une forme de vie centrée sur l’écoute de la Parole de Dieu, la prière, la fraction du pain (le partage du pain eucharistique) et le partage des biens matériels en fonction des besoins de chacun.

De fait, par l’écoute assidue de la Parole de Dieu assurée grâce à l’enseignement des apôtres, les fidèles sont raffermis dans leur foi au Christ ressuscité, laquelle s’approfondit de jour en jour par une vie de prière constante et par la participation aux célébrations eucharistiques. Par ces activités spirituelles les fidèles réaffirment leur relation de foi au Christ ressuscité, le seul capable d’insuffler en eux son Esprit et de les libérer de tout égocentrisme pour un partage fraternel des biens matériels dont ils disposent. La mise en commun de ces biens et le partage généreux qu’ils en font sont le signe visible d’une naissance à une nouvelle vie, fruit de la résurrection.

Ainsi, à travers leur unanimité (le fait d’avoir un seul cœur et une seule âme), les fidèles annoncent au monde que le Christ est vraiment ressuscité et qu’il se rend présent à eux par cette nouvelle forme de vie qui les distingue radicalement des autres hommes. C’est redire ici toute l’importance de la communion fraternelle dans notre vie chrétienne : par notre unanimité nous annonçons au monde que le Christ est vivant au milieu de nous.

Dans cette perspective, nous ne saurons imaginer l’impact positif que nous exerçons sur nos contemporains, du fait que nous puissions mener une vie de communion fraternelle exemplaire. Le fait que provenant de plusieurs cultures, ethnies, races, nous puissions nous mettre ensemble pour vivre dans l’unanimité, comme des frères et sœurs, est un témoignage éloquent, un message nouveau pour notre monde. Nous annonçons au monde non seulement la résurrection du Christ mais aussi l’amour miséricordieux de Dieu pour l’humanité.

L’une des leçons principales que nous aurons tirées de la présente crise infligée à notre monde par la pandémie du coronavirus est le fait que nous sommes plus que jamais condamnés à vivre de façon interdépendante, connectés les uns aux autres, dans un esprit de solidarité et d’entraide. Comme nous le rappelle à juste titre le Cardinal SARAH dans une interview qui lui a été accordée tout récemment sur le drame provoqué par le coronavirus dans le monde : « L’expérience du confinement a permis à beaucoup de redécouvrir que nous dépendons réellement et concrètement les uns des autres. Quand tout s’effondre, seuls demeurent les liens du mariage, de la famille, de l’amitié. Nous avons découvert que, membre d’une nation, nous sommes liés par des liens invisibles mais réels. Nous avons surtout redécouvert que nous dépendons de Dieu ».

Le deuxième lieu où s’exprime la présence du ressuscité à la lumière des textes de ce jour est la réalité des épreuves assumées dans la foi. En effet, les épreuves sont inhérentes à notre vie humaine, elles font partie intégrante de notre existence. Nous ne saurons donc les évacuer, les faire disparaître de notre vie. Le tout dépend de la façon dont nous les accueillons en les assumant dans la foi. Lorsque nous les assumons dans la foi au ressuscité, elles produisent en nous la joie, comme celle exprimée par les disciples à la vue du ressuscité.

Dans la page d’évangile il est dit que « les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur ». Remarquons que le Seigneur qui leur apparaît est bien celui qui portait la marque des clous dans les mains et à son côté, signes des dures épreuves endurées lors de sa crucifixion. En montrant ses mains et son côté lors de son apparition, il atteste sa victoire sur les souffrances endurées. La joie exprimée par les disciples est une reconnaissance de la victoire de la vie sur la mort.

C’est donc en communiant au Christ mort et ressuscité que nous pouvons entrer dans la joie des ressuscités. C’est de cette joie que nous parle l’apôtre Pierre dans la deuxième lecture lorsqu’il dit : « Exultez de joie, même s’il faut que vous soyez affligés, pour un peu de temps encore, par toute sorte d’épreuves ; elles vérifieront la valeur de votre foi qui a bien plus de prix que l’or – cet or voué à disparaître et pourtant vérifié par le feu – afin que votre foi reçoive louange, gloire et honneur quand se révélera Jésus-Christ ».

Ce temps de confinement et de suspension de célébrations eucharistiques est sans doute une période d’épreuves pour notre pays et en particulier pour la communauté chrétienne. Nous sommes appelés à vivre cette épreuve dans la foi au Christ ressuscité.

C’est lui qui peut nous aider à approfondir notre relation de foi avec lui à travers les épreuves que nous traversons, c’est aussi lui qui peut nous aider à traverser ces épreuves dans la joie et la sérénité des enfants de Dieu. Qu’il nous donne de vivre pleinement notre foi dans la joie des ressuscités, Lui qui vit et règne maintenant et pour les siècles des siècles. Amen !