6ème DIMANCHE DE PÂQUES 2020

17 mai 2020

6ème DIMANCHE DE PÂQUES.

Chers frères et soeurs,

En ce sixième dimanche de Pâques, la Parole de Dieu attire fortement notre attention sur l’Esprit Saint, don du Christ aux croyants. Nous le disons admirablement dans la prière eucharistique N°4 : « Il a envoyé d’auprès de Toi, comme premier don fait aux croyants, l’Esprit qui poursuit Son œuvre dans le monde et achève toute sanctification ».

Le don de l’Esprit Saint est intimement lié au mystère de Pâques[1]. Le Ressuscité a donné son Esprit pour que dans la puissance de cet Esprit, nous puissions continuer sa mission. Mieux, l’Esprit est Celui qui nous maintient dans l’amour du Christ et dans la fidélité à ses commandements. Dans l’évangile, Jésus lui-même présente l’Esprit de vérité comme celui qui demeure auprès des disciples, qui est en eux, qui est pour toujours avec eux. C’est Lui l’Esprit qui nous introduit dans l’intimité même de la relation entre le Christ et son Père : « vous reconnaîtrez que je suis en mon Père, que vous êtes en moi, et moi en vous ». Or l’essentiel de la vie chrétienne se trouve justement dans cette mystérieuse participation à la vie divine. Quelles sont alors pour nous aujourd’hui les implications de la présence de l’Esprit du Ressuscité en nous et auprès de nous ? Trois points essentiels méritent d’être soulignés.

* Le premier point, c’est que l’Esprit Saint associe tous les peuples sans distinction à l’œuvre du Christ. Dans la première lecture, nous voyons Philippe prêcher le Christ aux samaritains, qui étaient pourtant méprisés et rejetés par les juifs. Ce qui est frappant, c’est que ces samaritains accueillent avec joie la prédication de Philippe. L’Esprit Saint dispose leurs cœurs à accueillir la Bonne Nouvelle, et descend sur eux, à l’imposition des mains de Pierre et de Jean. L’Esprit réalise ainsi la catholicité, l’universalité de l’œuvre du Christ. Et en écho à la première lecture, l’idée d’universalité est fortement reprise dans le psaume responsorial : « acclamez Dieu, toute la terre ! »

C’est dire que le salut apporté par le Christ ne saurait être confiné dans l’espace socioculturel et religieux du monde juif. Car nul ne peut confiner l’Esprit Saint, nul ne peut confiner la Parole du Christ. Le Christ lui-même n’a jamais hésité à exercer son ministère terrestre en direction des non juifs. De la même manière, l’Esprit qu’il donne, fait sauter les barrières raciales et culturelles pour que l’Évangile parvienne jusqu’aux confins de la terre. Dès lors, l’identité chrétienne n’est plus une question d’appartenance raciale ; et c’est à ce titre que nous aussi, nous sommes associés à l’héritage du Christ.

Il y a là une vive interpellation pour tout disciple du Christ : si le Ressuscité par son Esprit, pousse son œuvre jusqu’aux extrémités de la terre, c’est pourtant sur nous ses disciples qu’il veut compter pour que son Évangile soit annoncé à tous les hommes. En conséquence, nous ne pouvons en aucun cas nous dérober à la mission. La catholicité de l’Église passe par chacun de nous.

La nouvelle évangélisation suppose et exige que chaque chrétien (pas seulement les prêtres et autres agents pastoraux) s’investisse véritablement dans l’annonce du Christ à ceux qui ne croient pas ou ne croient plus. Une Église en sortie vers les périphéries : voilà l’appel que par le pape François, le Christ lance aujourd’hui à chaque baptisé. Mais être capable de remplir une telle mission présuppose une vie d’intimité avec le Christ. C’est là justement le deuxième point de notre méditation.

* La centralité de l’amour du Christ dans la vie chrétienne. Au début de l’évangile Jésus dit : « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements. Moi je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur… » C’est dire que l’amour du Christ est à la fois la condition et le creuset de l’observance de ses commandements. C’est en effet à ceux qui l’aiment et qui sont au moins disposés à garder ses commandements que Jésus promet l’Esprit Saint.

La question est de savoir si notre relation avec le Christ repose effectivement sur un amour vrai. Quelle est la qualité de notre amour pour le Christ ? Sommes-nous disciples du Christ juste parce que nous recherchons des signes et des miracles ? Dans ma lettre pastorale sur la foi authentique, je faisais remarquer que la foi consiste à aimer Dieu et à le considérer comme l’Unique nécessaire de notre vie, au point de Le mettre à la première place en tout. Chrétiens mes frères et sœurs, est-ce que notre amour pour le Christ est d’une telle facture ? Comment pouvons-nous, comme le dit Pierre dans la deuxième lecture, honorer dans nos cœurs la sainteté de Dieu ?

Dans notre Plan Stratégique d’Action Pastorale, « Cultiver l’amour du Christ et l’amour de l’Église pour favoriser l’émergence d’une foi authentique » est le tout premier objectif stratégique. Je vous encourage donc vivement à cultiver l’amour du Christ et de l’Église par une vie de prière assidue, par la méditation de la Parole et la fréquentation des sacrements. C’est à ce prix que nous serons réellement capables de témoigner de notre identité au milieu du monde. C’est là le troisième point de notre méditation.

* Etre prêts à tout moment à rendre raison de l’espérance qui est en nous : c’est une exigence liée à notre foi. Dans la page d’évangile, Jésus affirme : « Celui qui reçoit mes commandements et les garde, c’est celui-là qui m’aime ». C’est dire que la fidélité au Christ, surtout dans les circonstances les plus défavorables, constitue la meilleure expression de l’amour que l’on a pour Lui.

En ce sens, le terme « Paraclet » ou « Défenseur » par lequel Jésus désigne l’Esprit est très suggestif. Ce terme appartient en réalité au langage juridique, et désigne l’avocat appelé auprès d’un accusé pour l’assister et le défendre. Mais pourquoi les disciples auraient-ils besoin d’un avocat défenseur comme s’ils étaient en procès ?

En réalité, l’évangéliste Jean insinue que le procès engagé contre le Christ se poursuit dans la personne de ses disciples dans le monde. D’ailleurs, au moment où Jean mettait par écrit son évangile, la persécution contre les chrétiens était déjà une réalité. Au cœur de ces persécutions, les premiers chrétiens pouvaient expérimenter la présence réconfortante du Paraclet et avoir l’assurance que Jésus ne les laisse pas orphelins. Pour notre part, nous aussi aujourd’hui, devons être prêts à lui rendre témoignage, même dans les circonstances les plus difficiles.

Cela, saint Pierre l’a bien compris quand il écrit : « soyez prêts à tout moment à présenter une défense devant quiconque vous demande de rendre raison de l’espérance qui est en vous ». Autrement dit, le chrétien ne doit jamais être une personne timorée, craintive, incapable de proclamer avec courage la vérité quand vient l’adversité. Non ! Chrétiens mes chers frères et sœurs, nous devons plutôt être des gens capables de répondre à tout moment et devant n’importe qui de l’espérance qui nous habite, toujours avec douceur et respect, mais avec fermeté, car nous avons le Paraclet, qui demeure pour toujours en nous. Notre témoignage doit se fonder sur une conduite exemplaire qui soit un lieu d’appel à la conversion pour tous.

Aujourd’hui encore, nous avons besoin de ce témoignage de façon particulièrement urgente. Car même si ce n’est pas la guerre des armes qui est partout déclenchée contre nous, on a quand même l’impression d’un certain déchaînement de puissances obscures qui tentent d’enserrer l’Église de toutes parts. Des ennemis du dedans et du dehors essaient de combattre l’Église du Christ. Mais nous sommes pleins d’assurance, car le Paraclet demeure avec nous. Voilà pourquoi chacun de nous doit approfondir sa vie d’intimité avec le Christ dans l’Esprit, et poursuivre le témoignage avec les seules armes de la sainteté.

Qu’à l’intercession de Marie mère de l’Église, chacun de nous puisse grandir dans l’amour du Christ et dans la fidélité à ses commandements, pour une vie de témoignage capable de transformer le monde. Que le Seigneur nous en accorde la grâce, Lui qui vit et règne maintenant et pour les siècles des siècles. Amen.

[1] Cf. Jn 7, 39 : L’Esprit n’avait pas encore été donné parce que Jésus n’était pas encore glorifié